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Cette communication porte sur le rôle des conseillers pédagogiques (CP) québécois dans la mise en oeuvre des politiques curriculaires (enseignement secondaire). Depuis la fin des années 1990, le Québec a connu une période d'activité intense dans le domaine éducatif, portant, d'une part, sur les dimensions « institutionnelles » de l'éducation – gouvernance par les résultats et reddition de comptes – et, d'autre part, sur ses dimensions « substantielles » (Lessard, 2010), à travers la réforme du curriculum.
Au Québec, les CP jouent un rôle central, ils doivent non seulement fournir un accompagnement pédagogique aux enseignants mais aussi s'assurer de la mise en oeuvre des prescriptions ministérielles. Cependant, les CP appartiennent à un groupe d'acteurs intermédiaires (entre État et établissements) dont le travail reste encore peu exploré, au Québec comme ailleurs (Des Ruisseaux et Lessard, 2004; Draelants, 2007; Duchesne, 2016).
Le travail des CP québécois relatif à la mise en œuvre des politiques curriculaires est ici interrogé à partir des questions suivantes : Comment les CP se saisissent-ils des textes qui constituent la politique curriculaire ? Quelles médiations opèrent-ils lorsqu'ils font usage de ces textes auprès des enseignants ? Quels sont les effets « tendanciels » (Delvaux & Maroy, 2004) que tend à produire ce travail de médiation ? Et enfin, quels sont les tensions et enjeux au cœur de ces processus ?
Nous abordons le travail des CP dans la perspective de la sociologie de l'action publique, à partir d'une enquête réalisée dans deux commissions scolaires (11 entrevues semi-dirigées). Nous montrons que les CP ne sont pas les relais neutres des textes officiels mais qu'ils opèrent un travail de médiation tributaire de leurs croyances et valeurs ainsi que d'ajustements stratégiques et pragmatiques. Cette médiation vise notamment à amortir les effets de réduction curriculaire (teaching to the test) induits par les évaluations ministérielles, et à valoriser les compétences sociales et civiques telles que définies dans le programme de formation. Cependant leur marge de manœuvre reste limitée et les tensions inhérentes à leur travail d'accompagnement sont exacerbées par les évolutions curriculaires de la dernière décennie. Enfin, le cas québécois permet d'interroger plus largement la reconfiguration du rôle des personnels en charge à la fois de la formation des enseignants, de l'accompagnement et de la mise en oeuvre des politiques curriculaires, dans un contexte où les normes encadrant le travail enseignant se fondent sur une conception de plus en plus étroite des « bonnes pratiques » définies en termes de rendement scolaire et fondées sur des recherches « probantes » comme le préconise l'éducation basée sur la preuve.
