Quel type d'être humain le pacte entend-il faire éclore ?
Bernard Delvaux  1@  
1 : Groupe interdisciplinaire de Recherche sur la Socialisation, l'Education et la Formation  (Girsef)  -  Site web
Place Montesquieu, 1/14 1348 Louvain-la-Neuve -  Belgique

Au fond, quelles sont les finalités éducatives poursuivies par le Pacte pour un enseignement d'excellence, au-delà des objectifs opérationnels tels que la réduction du taux de redoublement, l'augmentation du pourcentage de réussite aux évaluations certificatives ou l'amélioration du classement de la Belgique francophone dans PISA ? Peut-on identifier clairement dans le Pacte quel type d'être humain il s'agirait de faire éclore à travers la scolarité ?

Bien que la note du Gouvernement ouvrant le processus du Pacte aie demandé de préciser ce qu'il faudrait « mettre dans la tête, le cœur, les mains des jeunes de 18 ans, issus d'une société de plus en plus multiculturelle », aucun des rapports et textes légaux issus du Pacte n'identifie clairement de telles finalités. Les documents ne vont guère au-delà du rappel des quatre missions mentionnées dans le décret de 1997 et d'une liste peu ordonnée des qualités humaines, comme celles énoncées dans cette même note du Gouvernement : « faire des citoyens épanouis, intégrés, lucides, curieux, critiques, responsabilisés, capables de s'adapter, d'innover, de décoder le monde dans lequel ils vivront, mais aussi [...] en faire des acteurs qui travailleront, porteront des projets et créeront dans une société qui mise de plus en plus sur l'intelligence, la mobilité, l'adaptabilité, la créativité et l'autonomie de ses citoyens ».

L'éventuelle cohérence des finalités évoquée çà et là dans les textes est donc plus implicite qu'explicite. Le chercheur peut tenter de la reconstituer en identifiant les termes qui évoquent des finalités et en les replaçant dans leur contexte pour décrypter leur sens et leurs liens. C'est un des objectifs de la présente communication, qui se basera notamment sur l'analyse de la note du gouvernement ci-dessus mentionnée, du rapport du groupe de travail n°2, de l'avis n°3 du groupe central, ainsi que du décret « Code » et lds débats préparatoires à ce décret. Il s'agira de comprendre le sens donné à des termes tels qu'émancipation, autonomie, égalité et citoyenneté, et d'identifier ainsi les approches philosophiques dont le Pacte s'inspire de manière implicite voire inconsciente.

L'interprétation ne doit pas être assumée seulement par le chercheur. En l'absence d'une « ligne claire », les acteurs en charge de la mise en œuvre du Pacte y sont aussi contraints. Parmi eux, les membres des groupes de travail chargés de rédiger les référentiels, les enseignants devant donner cours ainsi que tous les acteurs de niveau intermédiaire. Le second objectif de la présentation consistera donc à interroger, à partir de la théorie de l'action publique, ce sur quoi pourrait déboucher ce processus de traduction. L'hypothèse est celle d'une diversification des traductions et, dès lors, d'une fragmentation du système scolaire en entités de plus en plus différenciées, par ailleurs encouragée par le nouveau mode de régulation mis en place par le Pacte.


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